« Je suis obligée d'être féministe pour être une femme libre »



Joumana Haddad

Joumana Haddad se déclare être une femme libre dans un pays arabe tel que le Liban. Cette écrivaine, journaliste et poète libanaise a décidé de faire face aux hommes, aux coutumes et aux traditions arabes. Dans son oeuvre J'ai tué Shéhérazade Joumana Haddad n'épargne personne, elle condamne la burqua et dénonce la chirurgie esthétique dans lesquelles beaucoup de femmes libanaises sont tombées. C'est une femme arabe en colère qui parle, mêlant récit personnel, méditations et poèmes. Joumana Haddad fait un constat de l'évolution de sa vie allant de ses premiers troubles, ses premières lectures du marquis Sade en passant par son adolescence dans une ville en guerre à sa vie de jeune femme écrivant de la poésie libertine jusqu'à sa vie actuelle de femme de quarante ans rédactrice en chef d'un magazine érotique en langue arabe.














Son combat n'est pas nécessairement celui de défendre les droits de la femme cependant elle s'oppose vigoureusement a toute forme d'oppression mentale, de limitation, de censure et d'hypocrisie, car d'après elle l'hypocrisie empêche la liberté de la vérité. Elle s'oppose notamment contre toutes les femmes arabes qui participent a leurs oppressions, contre les hommes qui se mentent à eux mêmes et qui croient aux mensonges, car ce sont ceux-la qui empêche l'avènement de l'homme libre. 
« Ah !la censure. Ce fameux ange noir, pathétique, planant sur le triangle arabe des Bermudes (le sexe, la religion, la politique). » J'ai tué Shéhérazade  Joumana Haddad 

Joumana Haddad explique son point de vue sur les arabes d'aujourd'hui, elle dénonce l'hypocrisie, car d'après elle, vivre en toute franchise dans le monde arabe est impossible. La mentalité assez étouffante dans le monde arabe d'aujourd'hui laisse place à des principes tels que l'image de la famille qui doit être maintenu, les jeunes filles adolescentes n'ont pas le droit de sortir tard la nuit, de sortir avec des garçons, pourtant un garçon, lui a droit de sortir. Il s'agit de cette différence entre les filles et les garçons au moyen orient que Joumana Haddad dénonce dans son livre.


« Etre arabe aujourd'hui implique premièrement ( ceci dit sans généralisation ) avoir maîtrise l'art de la "schizophrénie " .
Pourquoi ? Parce que , pour être arabe aujourd'hui , il faut être hypocrite . Parce qu'il est impossible de vivre et de penser selon son gré , en toute sincérité , spontanément et avec candeur . Scindé en deux , on est prive du droit de dire la vérité a l’état brut ( et la vérité est brute ; c'est son rôle , et sa force ), parce que la majorité arabe dépend d'un tissu rassurant de mensonges et d'illusions. Notre vie , nos histoires doivent être refoulées , étouffées et encodées ; réécrites conformément aux édits des chastes gardiens de la pureté, afin qu'ils soient assures que le délicat "hymen" arabe a été préserve du péché , de la honte, du déshonneur ou du manquement. [...]
Ces "soldats de la chasteté " défendent l’éthique , qui ne peut que les rejeter. Ils prétendent protéger les valeurs , les vraies valeurs humaines n'ayant pourtant rien a voir avec eux .ils se proclament défenseurs de ce qu'ils ont l'audace d'appeler l'honneur, la foi, la dignité et la morale, avec leur esprit malade et retors, criant haut et fort qu'il faut "sauver notre religion, nos coutumes, nos traditions et notre jeunesse" [..]
Ces "voleurs" nous ont prives de nos vies privées. Ils nous ont vole notre liberté individuelle et civique  » J'ai tué Shéhérazade , Joumana Haddad










































Joumana haddad est une femme menacée au Liban par plusieurs parties musulmans, mais aussi chrétiens. Dans son livre elle dit qu'il n'y a pas que les musulmans, mais les chrétiens aussi ont une mentalité assez dure et qui suivent les coutumes. Les gens ont tendance à croire que les chrétiens sont plus ouverts, mais ce n'est pas le cas pour toutes les familles chrétiennes au Liban. D'ailleurs au Liban les mariages entre chrétiens et musulmans sont rare et jamais approuvé par les familles. Le mariage civil est interdit au Liban.


«Ma famille était catholique, très traditionnelle. J'ai été dans une école de bonnes sœurs pendant 14 ans. Là encore, c'est facile de confondre monde arabe et monde musulman, de dire que les arabes musulmans sont très traditionnels, quand les chrétiens seraient plus ouverts. Ce n'est pas toujours le cas, et c'était important pour moi que cela figure dans le livre. » Joumana Haddad , interview par Pierre Puchot





















Joumana Haddad a 38 ans , investit 50 000 $ de sa propre poche et trouve des sponsors toute seule , pour mettre en place dans le monde arabe : Jasad , qui veut dire corps place le première magazine érotique en arabe .






Sur la couverture de son magazine nous pouvons voir une calligraphie en forme de menotte ouvert. Joumana Haddad a choisi d'aborder plusieurs thèmes dans son magazine; Kama Soutra, homosexualité, première fois, pénis. 
Jusqu’à présent il ne s'agit de rien de très choquant, sauf que dans le monde arabo-musulman, ce genre de thèmes, l’érotisme et la sexualité ne sont pas du gout de tous. D'ailleurs Joumana a déjà reçu plusieurs menaces et roule en voiture avec un chauffeur. Le magazine est vendu sous cellophane opaque pour ne choquer personnes en librairie. 
Son magazine marche plus ou moins bien, nous avons des chiffres qui le prouvent:




  • - 3.000 exemplaires vendus en 11 jours pour le 1er numéro
  • - 4.000 exemplaires vendus pour le 2ème Numéro paru en Mars 2009
  • - 400 abonnés "dont 3/4 saoudiens


Joumana Haddad ne se qualifie pas féministe mais post féministe, « Je suis obligée d'être féministe pour être une femme libre » dit elle lors d'une interview. Elle revendique beaucoup de choses dans son livre, tel que l’absence du mariage civil au Liban. C'est une femme très courageuse, elle est la première a publié un magazine érotique dans le monde arabe. 
Maintenant nous pouvons nous poser une questions son combat va-t-il changer les choses? Avancer le Liban? Faire disparaître les traditions? Les femmes vont-elles enfin avoir une liberté?
Seul l'avenir nous le dira.